Au fil des révélations et des scandales, en cette fin du mois de février le contexte continue d’être pesant pour notre Eglise. Elle apparaît fragilisée, mise en question, en perte de crédibilité. Comment entendre dans un tel contexte l’affirmation bien connue du Seigneur à Simon-Pierre : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise. Et la puissance de la mort ne l’emportera pas sur elle » ? Cette promesse fait suite à la profession de foi de l’apôtre : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ». Elle précède la première annonce de la Passion et la très vive interpellation de Jésus à l’adresse du même Simon-Pierre qui voulait l’en préserver : « Passe derrière moi, Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celles des hommes. » (Mt 16,23)
Choisir de s’appuyer sur la parole du Seigneur, c’est choisir de partager ses perspectives, c’est prendre part au combat dans lequel il est engagé, alors même que les forces du mal ne cessent de chercher, de susciter, de trouver en nous des complicités funestes. L’enjeu ne peut en être minimisé : il en va de l’accomplissement de notre humanité. Face à l’intensité de ce combat, Pierre comparera plus tard le démon au lion qui rôde à la recherche d’une proie. (1 P 5,8) Paul, lui, écrira aux Ephésiens : « Puisez votre énergie dans le Seigneur et dans la vigueur de sa force. Revêtez l’équipement de combat donné par Dieu, afin de pouvoir tenir contre les manœuvres du diable. » (Eph 6, 10-11)
Le concile Vatican II n’a pas dissimulé la réalité de ce « dur combat contre les puissances des ténèbres ». « Il passe à travers toute l’histoire des hommes. Commencé dès les origines, il durera jusqu’au dernier jour. Engagé dans cette bataille, l’homme doit sans cesse combattre pour s’attacher au bien et ce n’est qu’au prix de grands efforts, avec la grâce de Dieu, qu’il parvient à réaliser son unité intérieure. » (L’Eglise dans le monde de ce temps, 37 § 2)
Aux premiers jours du Carême, et tandis que la préparation des catéchumènes à la célébration des sacrements va s’intensifier, peut-être est-il bon de demander au Seigneur une nouvelle fois la grâce de prendre plus vivement conscience de son appel à le suivre dans son combat. Sa résurrection ne nous autorise pas plus à vivre dans la somnolence spirituelle que dans le pessimisme stérile. Il s’agit de progresser en vérité et en lucidité, refusant de nous mentir à nous-mêmes en appelant bien ce qui est mal. Il s’agit de rendre grâce pour la proximité de Jésus avec les pécheurs, d’accueillir son appel à la conversion. La croix nous le révèle pleinement vainqueur du mal par le bien : brisé par notre violence, il se donne librement, il demande au Père notre pardon. Et il nous commande d’aimer comme il nous aime.
Le 24 février 2019 + Robert WATTEBLED Evêque de Nîmes
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